TÉLÉPHONE ARABE


Enseigne lumineuse, Bazaar Compatible Program, Anshun Lu, Shanghai
, 2012

Prise de vue : Paul Devautour

Le mot téléphone écrit en langue arabe crée une discontinuité de sens avec l'expression française téléphone arabe. En effet, le mot téléphone écrit en langue arabe n'est particulièrement arabe que pour les non-arabophones ; les arabophones, quant à eux, lisent le mot téléphone sans que ne leur soit perceptible la dénotation d'arabe et encore moins la connotation qui lui est associée dans la langue française, signifiant d'une part la rumeur - ou une information peu fiable - et d'autre part le jeu des enfants qui se passent en ronde un message à l'oreille, jusqu'à ce qu'il soit complètement déformé.


Craie sur tableau noir,
restaurant Les animals, Ménagerie de verre, Paris, 2011

Actualisation et prise de vue : Fabrice Guyot


Enseigne lumineuse,
exposition L'échelle humaine, Galerie Saw Galery, Ottawa, 2007

Réalisé sous la forme d'un néon et accroché sur un pont à Bruxelles, un premier Téléphone arabe a vite été vandalisé. Le centre d'art qui m'avait invité à produire cette pièce a alors fait appel à un calligraphe pour produire une affiche de substitution collée à même le mur (Recyclart, 2005). Cet enchainement de faits a initié une série dont chaque nouvel élément est copié à partir du dessin de celui qui le précède, sans considération de lisibilité, rejouant en ceci la règle non écrite du jeu du téléphone arabe tel que le pratiquent les enfants. À partir du dessin du calligraphe, un nouveau néon a été produit à Montréal en 2006 et installé au fronton d'une maison privée. Il a ensuite été actualisé dans le centre d'Ottawa, où il a parasité la signalétique désormais obsolète d'un ancien bâtiment gouvernemental (Saw Gallery, 2007). Notons que l'expression téléphone arabe, peu utilisée au Québec, ne signifie plus rien dans la capitale fédérale du Canada, à majorité anglophone. Signifiant en mal de signifié, intraduisible, le Téléphone arabe dérive en assumant les affres d'une copie aveugle.


Néon, rue Wiseman, Montréal, 2006.

Depuis, tel un agent dormant, le Téléphone arabe attendait sagement qu'une mission se présente. Récemment, Il a été interprété à Paris et à la craie, sur un tableau noir, retrouvant pour un temps son foyer linguistique d'origine (Ménagerie de verre, 2011). C'est ce modèle qui a été confié à l'artisan chargé de le reproduire sous la forme d'une enseigne lumineuse pour la boutique du bazar d'Anshun Lu, dans le cadre du Bazaar Compatible Program.


Calligraphie sur papier, Recyclart, Bruxelles, 2005.


Néon, Komplot pour Recyclart, Bruxelles, 2005.


Conférence-performance, Crossroads in Cultural Studies. Université Paris 3 Sorbonne nouvelle, 2012
Performeur-Interprète : Marc-Alexandre Reinhardt
P
rise de vue : Vincent Couture

Voir aussi la revue Marge, ainsi que la revue Substance (en anglais)