La transformation d'une eau chaude en eau froide a ceci de commun avec la transformation de l'eau froide en eau chaude qu'il se trouve forcément un moment, plus ou moins long, où l'eau n'est plus ni chaude ni froide, mais tiède. Le tiède est un moment de l'eau, un passage, un tracé. Ce qui m'étonne, c'est que de cet état naturel de l'eau qui désigne la succession de tous les moments entre le chaud et le froid, on ait pu tirer une morale presque unanime («Dieu vomit les tièdes»). En choisissant d'inscrire ma réflexion sous les auspices du tiède, en lui donnant cette température d'origine, je cherche un improbable mitan dialectique comme point de départ, à contre-courant des métaphores morales.
Pour résumer, je dirais que l'absence d'estime que suscite l'eau tiède pour le sens commun est précisément ce qui la rend inestimable à mes yeux.

NEUTRE